Microdensitométrie

Microdensitométrie

La microdensité indirecte aux rayons-X

Une technique ancienne mais toujours d’actualité

La microdensité indirecte aux rayons X est un des outils de base de Phénobois, qui possède deux laboratoires équipés, l’un à Orléans et l’autres à Bordeaux. Ces deux laboratoires utilisent tous les deux la microdensité indirecte aux rayons X en routine. Chaque installation correspond à des besoins et des compromis techniques légèrement différents : un peu plus haut débit à Bordeaux, un peu plus de précision à Orléans.

L’analyse des cernes annuels

Les rythmes climatiques saisonniers affectent l’activité du cambium. Par exemple, en climats tempérés, le cambium est dormant en automne-hiver et actif du printemps à la fin de l’été ou au début de l’automne. Pendant cette période d’activité, le cambium met en place une nouvelle couche de cellules de xylème, dont les caractéristiques varient en fonction de facteurs internes et environnementaux, comme le climat : le cerne annuel.

Anatomie-cerne-conifere

L’analyse directe ou indirecte, instantanée ou rétrospective, des caractéristiques des cernes annuels apporte beaucoup d’information sur le fonctionnement de l’arbre et sur les caractéristiques du bois accumulé année après année dans le tronc (Rozenberg et al., 2012). Le principal axe de variation des caractéristiques des cernes est le rayon de l’arbre, de la moelle vers l’écorce.

Rondelle-pseudotsuga-menziesii

L’analyse microdensitométrique 

Le rapport masse sur volume d’un échantillon de bois, soit la masse volumique, est appelé densité par abus de langage. La microdensité est la densité mesurée à petite échelle. En pratique, la microdensité correspond à la densité d’un groupe de cellules de xylème bien localisé dans le cerne, de dimensions radiales généralement comprises entre 10 et 100 microns. Le profil de microdensité décrit les variations radiales de la microdensité, depuis la moelle jusqu’à l’écorce. Il traverse tous les cernes accumulés dans le tronc au niveau échantillonné.

Profil-microdensitometrique-de-trois-cernes-successifs

La technique de microdensité indirecte aux rayons X

La microdensité indirecte aux rayons X est une technique de production de profils microdensitométriques inventée par Polge à l’INRAE de Nancy dans les années 1960 (Polge, 1978) et constamment améliorée depuis (Mothe et al., 1998) : sur une image radiographique, le niveau de gris ne dépend que de l’épaisseur et de la densité de l’objet radiographié. Donc, à épaisseur constante, le niveau de gris d’un échantillon de bois ne varie qu’en fonction de sa densité.

Épaisseur constante

La première étape consiste à prélever un échantillon de bois et à le préparer de façon à obtenir une épaisseur constante. Pour cela on utilise une scie à lames jumelles qui permet de scier une planchette d’épaisseur variant autour de deux mm, dans différents types d’échantillons de bois, y compris des carottes récoltées dans des arbres sur pied. Certaines scies utilisées par d’autres laboratoires peuvent permettre de descendre jusqu’à une épaisseur de 1 mm.

Planchette-bois-epaisseur-constante

Radiographie rayons X

Les planchettes sont ensuite radiographiées en utilisant des techniques proches de celles pratiquées en radiologie médicale. Les paramètres de la radiographie (distance source-objet, puissance du rayonnement X, durée d’exposition) sont choisis en fonction des principaux besoins et des priorités du laboratoire.  Les planchettes de bois sont radiographiées en même temps qu’un échantillon-étalon de densité et d’épaisseur connus, construit avec un matériau ayant un coefficient d’absorption des rayons X proche de celui du bois. Selon les laboratoires, les films rayons X peuvent être développés manuellement ou automatiquement. Ensuite les films développés sont numérisés à l’aide d’un scanner compatible avec des supports transparents. De nos jours les films rayons X peuvent être remplacés par des matrices de détecteurs qui permettent de passer directement des échantillons de bois à l’image numérique, sans passer par le film radiographique, à condition de se contenter d’une résolution inférieure à celle offerte par les films. Pour l’instant, Phénobois utilise une résolution de routine de 25 microns, descendant parfois à 10 microns, qui impose la radiographie analogique.

Radiographie Rayons X d’une planchette de bois.jpg

Les techniques alternatives

Sur le site d’Orléans, Phénobois utilise la radiographie indirecte aux Rayons X avec une distance source-objet de 1,6 m, qui permet l’utilisation d’échantillons atteignant 5 mm d’épaisseur pour une durée d’exposition de l’ordre de 15 mn. A Bordeaux, Phénobois utilise une distance source-objet de 0,5 m qui limite l’épaisseur des échantillons à environ deux mm, mais qui réduit la durée d’exposition et permet d’augmenter le débit. Phénobois étudie également des méthodes alternatives, qui pourraient soit permettre d’analyser les échantillons à cernes très fins, difficiles à traiter avec la microdensité aux rayons X, soit augmenter fortement le rythme d’acquisition des données, au prix d’une diminution de la qualité des profils. Selon les besoins, une forte augmentation du débit et du nombre d’arbres analysés associée à une diminution de la qualité des profils peut être considérée comme le meilleur compromis.

L’acquisition du profil microdensitométrique

Phénobois utilise le logiciel Windendro © (Guay et al., 1992) pour obtenir le profil microdensitométrique à partir de l’image radiographique de la planchette de bois, combinée aux informations de calibration lues sur l’échantillon-étalon radiographié en même temps que les planchettes.

Profil-microdensitometrique

Au cours de l’acquisition, l’opérateur a la possibilité de sélectionner et valider l’emplacement des limites de cernes annuels le long du profil microdensitométrique. Ces limites permettent de calculer ensuite différentes variables de cernes (largeur, densité, etc…).

A quoi sert la microdensité ?

La microdensité est un caractère à la fois complexe, intégrateur et relativement facile à acquérir, à partir d’échantillons assez faciles à récolter et non-destructifs, les carottes. Les informations recueillies servent aussi bien à qualifier le matériau bois (Rozenberg et al., 1999) et à l’intégrer dans des programmes d’amélioration génétique (Bouffier et al., 2008) qu’à étudier de façon rétrospective la réponse des arbres aux variations de leur environnement, ouvrant la voie aux études de l’adaptation au changement climatique (Dalla-Salda et al., 2011; Martinez-Meier et al., 2009; Ruiz Diaz Britez et al., 2014; Sergent et al., 2014).

Références

Ruiz Diaz Britez, M., Sergent, A.-S., Meier, A.M., Bréda, N., and Rozenberg, P. (2014). Wood density proxies of adaptive traits linked with resistance to drought in Douglas fir (Pseudotsuga menziesii (Mirb.) Franco). Trees 1–16.

Sergent, A.-S., Bréda, N., Sanchez, L., Bastein, J.-C., and Rozenberg, P. (2014). Coastal and interior Douglas-fir provenances differ in growth performance and response to drought episodes at adult age. Ann. For. Sci. 1–12.

Rozenberg, P., Sergent, A.S., Dalla-Salda, G., Martinez-Meier, A., Marin, S., Ruiz-Diaz, M., Bastien, J.C., Sanchez, L., and Breda, N. (2012). Analyse retrospective de l’adaptation a la secheresse chez le Douglas. Schweiz. Z. Forstwes. 163.

Dalla-Salda, G., Martinez-Meier, A., Cochard, H., and Rozenberg, P. (2011). Genetic variation of xylem hydraulic properties shows that wood density is involved in adaptation to drought in Douglas-fir         ( Pseudotsuga menziesii (Mirb.)). Ann. For. Sci. 68.

Martinez-Meier, A., Sanchez, L., Dalla-Salda, G., Gallo, L., Pastorino, M., and Rozenberg, P. (2009). Ring density record of phenotypic plasticity and adaptation to drought in Douglas-fir. For. Ecol. Manag. 258.

Bouffier, L., Charlot, C., Raffin, A., Rozenberg, P., and Kremer, A. (2008). Can wood density be efficiently selected at early stage in maritime pine (Pinus pinaster Ait.)? Ann. For. Sci. 65, 106–106.

Rozenberg, P., Franc, A., Mamdy, C., Launay, J., Schermann, N., and Bastien, J.C. (1999). Genetic control of stiffness of standing Douglas fir; from the standing stem to the standardised wood sample, relationships between modulus of elasticity and wood density parameters. Part II. Ann. For. Sci. 56, 145–154.

Mothe, F., Duchanois, G., Zannier, B., and Leban, J.M. (1998). Microdensitometric analysis of wood samples: data computation method used at INRA-ERQB (CERD programme). Ann. Sci. For. 55, 301–313.

Guay, R., Gagnon, R., and Morin, H. (1992). A new automatic and interactive tree ring measurement system based on a line scan camera. For. Chron. 68.

Polge, H. (1978). Fifteen years of wood radiation densitometry. Wood Sci. Technol. 12, 187–196.